...et autres rêves
Par Catherine Delhom
Je gardais précieusement mon vendredi pour sortir.
Ma découverte de Paris avait été celle des musées, des galeries (et des grands magasins, mais c’est une autre histoire). Alors, passée l’époque des couches et du porte-bébé, j’ai cherché une nounou du vendredi pour aller hanter ces lieux de rêve et de perdition.
Le Louvre, le musée d’Orsay, le Grand Palais, quelques galeries ont été mes promenades. Quand la petite dernière a été en âge de marcher, je l’ai trainée parfois avec moi. Prendre le métro était une aventure.
Au Grand Palais, il y a eu La Pie de Monet dès l’entrée. Enthousiaste, elle s’est précipitée vers le tableau, et a posé un doigt sur l'oiseau, perché sur une barrière dans un paysage de neige. On imagine la suite, les gardiens qui se précipitent, remontrances, moi ennuyée (mais ravie). J’ai acheté La Pie. Pas cher, petit format à la boutique. L’original n’était pas dans mes prix. Il porte peut-être encore des traces d’ADN de ma fille...
Une autre fois, c’était le Musée de l’Orangerie, et Les Nymphéas de Monet, encore lui. Les empâtements, le tourbillon, la couleur, la vie, on les a regardés de près , de loin, de face, de profil. Peu de temps avant nous avions visité la maison de Monet à Giverny, vu l’étang aux nymphéas. On les imaginait bien, on voyait Monet travailler.
Quelques semaines plus tard, la professeure de dessin de ma fille propose un travail de classe: dessiner Les Nymphéas de Monet. Elle montre aux enfants une reproduction. Bonne idée, bien sûr. Muriel ravie revoit le tableau de Monet, et elle peint à la gouache, avec le relief , les empâtements, les couleurs du modèle. Me montre son travail, pas mal du tout. Je l’encadrerai quand il sera fini. Je suis heureuse de son plaisir.
Mais elle revient de l'école déçue, humiliée, en colère. La professeure a noté: “travail sale”, mauvaise note. Les bonnes notes sont allées aux dessins clairs, pastel et enfantins des enfants qui ne connaissaient pas le tableau. Ni Monet, ni la peinture à l’huile. Quelque temps plus tard, voulant encadrer le dessin, je l’ai cherché dans le carton glissé derrière la commode. Les nymphéas n’y étaient pas. elle l’avait déchiré.
Oh Monet si tu savais , ton travail était sale, tes ongles et ton tablier aussi.
L’école devrait donner aux enfants le goût de la couleur, du bonheur de la vie.
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